Les ptites banalités de Cunégonde

Est-ce qu’après l’enterrement,
je pourrai vivre
qu’avec des souvenirs sympas
de ma sœur ?

Le monde a l’envers.
Je m’inquiète tellement
à cause du cancer de ma sœur
qu’elle me téléphone
pour me donner de ses nouvelles
et me rassurer.

Quand le crabe bouffe
ma sœur ainée,
je me sens si impuissante…

Se laver avec de l’eau chaude
va devenir du luxe,
dans mon immeuble.
Le prix du m³ d’eau chaude
est passé à 12€50,
soit une augmentation de 31,50%,
depuis le début de l’année.
Je me demande avec quoi
il la chauffe l’eau.

Avec le choc de la maison.
La peur de la perdre,
les conséquences que
cela aura.
Je me dis que
mon quotidien est aussi
très important.

J’ai voulu m’acheter
une petite bouteille de gel hydroalcoolique
à la pharmacie à côté du métro Lourmel.
5€99 les 250 ml,
soit 23€96 le litre,
plus cher que certains vins
qui valent le coup.

J’ai pris plusieurs claques
à cause de ce virus.
Des morts que j’ai du mal à digérer,
De façon morbide,
je regarde les chiffres tous les jours,
ou presque.
Il s’agissait d’anonymes,
même si souvent, je remarque
qu’il a englouti plus de personnes en un jour
qu’il y d’habitants dans mon village.
Mais là, par 2 fois, il ne s’agit pas des inconnus.
Quand ce n’est pas le virus qui tue directement.
Il attaque sournoisement.

Je m’aperçois ce matin
que je n’ai plus de PQ.
Je suis allée en acheter.
Si ce soir on apprend
qu’on confine,
il y a un risque de ruée.

Quand je suis sortie de l’herboristerie.
Je me suis dit que
comme j’était dans le quartier,
je me mangerais bien
un dorayaki.
Les magasins japonais étaient
si prisés qu’une longue,
trop longue file d’attente
a eu raison de mon envie.

Je viens de réaliser
qu’aujourd’hui mon village a
été rayé de la carte.
Il a 576 habitants.
Il y a eu 820 morts du covid.