Pudeur photographique

Rares sont les personnes (moi, la première) qui
regardent une photographie et qui expriment
ce qu'elles ressentent comme émotion.

Pourtant certaines photographies m'ont heurtée,
m'ont bouleversée, m'ont perturbée, m'ont enjouée,
m'ont donnée du plaisir, m'ont émue aux larmes...

J'ai en tête des photographies de Salgado, de Burri, des Becher, de Kenna, de Brihat...
Je me souviens des émotions ressenties
face à certaines de ces photographies.

J'ai pourtant du mal à mettre des mots
sur les émotions que j'ai eu en les regardant,
même maintenant en me remémorant certaines.

Quand nous parlons photo,
nous parlons construction,
nous faisons des remarques sur les lignes de fuite.
Nous commentons la netteté, le contraste, l'harmonie des courbes,
le chois du cadrage, que sais-je encore.

Sommes-nous, suis-je si pudique
pour ne pas arriver à nommer,
décrire les émotions que les photographies me procurent ?

Commentaires

1. Le mardi 12 avril 2011, 08:38 par mirovinben

Il s'agit de résonance subtile entre le vécu du regardant et ce qu'a voulu (ou obtenu instinctivement) le photographe. Cette résonance n'a pas forcément de mots pour être décrite, analysée, exprimée. A la différence des "raisonnances" techniques. Focale, point de fuite, règle des tiers... tout est bien balisé et chaque participant à l'échange a le même référentiel.

Sinon, rien à voir (quoique...) : serais-tu arachnophobe ;-)

2. Le mardi 12 avril 2011, 10:12 par Anthom

Je ne suis pas sûre que ce que je vais dire résiste bien à l'examen, mais c'est la première idée qui m'est venue à la lecture de ton billet: il me semble que l'émotion s'installe - en priorité ou en général- là où la compréhension fait défaut. En tout cas elle s'efface derrière la compréhension.
C'est un peu la même chose avec la musique ou la peinture: si un morceau de musique m'émeut, je peux l'exprimer car mon manque de connaissance technique dans ce domaine ne vient pas faire écran. Devant une peinture, je réagis comme devant une photographie car la technique me parle.
Je retrouve le même phénomène dans le domaine littéraire ou cinématographique où, à cause de ma formation et de l'approche professionnelle qu'elle induit, l'émotion est forcément un peu reléguée au second plan. Je la ressens bien sûr, mais je ne l'exprime pas, l'analyse va automatiquement prendre le pas.
Petite remarque: j'ai découvert il n'y a pas très longtemps les photos de Michael Kenna et j'ai été particulièrement fascinée par ses albums sur le Japon!

3. Le mardi 12 avril 2011, 12:22 par Cunégonde

Si je vous comprends bien tous les deux, la technique prendrait le pas sur les émotions. hum
non, je ne suis pas arachnophobe.
Les photos de Kenna en vrai (en expo) sont pour moi ...Non, je ne vais pas exprimer ni émotion, ni technique:-)

4. Le mardi 12 avril 2011, 14:11 par mirovinben

Anthom, j'aime ton explication qui, donc, me paraît à la fois pertinente et fort bien formulée.

Cunégonde, "la technique prendrait le pas sur les émotions ?"... heu, je dirais plutôt qu'elle évite d'exprimer ses émotions et simplifie (?) le dialogue (via un référentiel partagé). C'est tout à fait mon mode de fonctionnement, lié à une déformation professionnelle installée depuis 40 ans et que je m'efforce de combattre à présent.

Sinon... Arachnophobie était une des explications que j'avais trouvées pour expliquer le nombre impressionnant de commentaires sur un de mes billets...

5. Le mardi 12 avril 2011, 22:13 par Cunégonde

mirovinben> En te répondant, je pensais bien à cette photo là:-)).

Anthom, mirovinben> je me souviens de l'expo de Salgado: Exode. Je me suis retrouvée coincée dans un groupe de photographes. Ils ne parlaient que technique, c'était à mon goût détestable ! Ils ont manqué m'éloigner de mes émotions. Je crois que plus je vieillis moins je m'attache à la technique. Elle est très importante pour que le discours soit compréhensible mais elle ne devrait pas être primordiale, surtout si elle est au RDV. Bien sûr quand elle est absente, son manque est le sujet principal de tous les échanges.

6. Le jeudi 14 avril 2011, 10:14 par imposture

pour ma part, je dirais que la poésie, c'est ce qui reste quand on oublie la technique. l'idéal de l'art moderne c'est d'arriver même à ce que l'on ne voit plus trace de la technique qu'il n'y ait plus qu'à apprécier l'essentiel.

7. Le jeudi 14 avril 2011, 10:19 par imposture

je sens bien sur ce coup que l'on pourrait bien être d'accord ;-)

8. Le jeudi 14 avril 2011, 21:55 par Cunégonde

Je me demande juste si tu aimerais que nous soyons d'accord sur un point:-))

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